Proximité de la culture,
culture de la proximité
A
quelques mois des élections municipales, de la fin de mon mandat comme adjoint
de Roger Madec, j'ai forcément envie de donner quelques éléments de bilan et
quelques propositions.
La
proximité a été mon axe dominant. Ma première initiative dans le cadre de l'équipe
municipale a été d'organiser la Fête de la musique en 2001 dans la Butte du
chapeau rouge. Paris Quartiers d'été a pris le relais avec les concerts de
musique du monde. Un souvenir particulièrement fort… Celui de ces femmes nord
africaines écoutant le virtuose Mickael Rudy sur son piano royal. La projection
de cinéma en plein air sur la place des Fêtes est aussi une démarche
importante parce qu'elle a reposé sur une démarche : un film choisi par les
jeunes du club de prévention Feu vert.
La
construction du 104, ce grand projet culturel de la mandature, se fait dans la
constante préoccupation de son intégration dans le quartier Riquet et Curial.
Depuis le début de cette année, l'installation provisoire au 11 bis rue Curial
est devenu un lieu de rendez-vous permettant de répondre à la diversité des
demandes, les jeunes, les moins jeunes, les anciens salariés des Pompes funèbres,
les populations et leurs différentes origines et expériences. Le 104 ne peut
se développer qu'en étant en permanence soucieux des artistes et de leurs
projets en lien avec les populations, structures et associations, particulièrement
celles du voisinage. La spécificité du 104 est sans doute aussi renforcée car
elle intègre une démarche pédagogique régulière dans la construction des
projets artistiques.
Dans
ce sens naturellement, il ne peut y avoir de diffusion de la culture sans un
travail déterminé vers les jeunes et donc les scolaires. Tous jeune doit avoir
été incité à découvrir des pratiques artistiques diverses. Pour cela, l'école
est un lieu essentiel puisque particulièrement à Paris la très grande majorité
des jeunes sont scolarisés jusqu'à 18 ans et plus. De la maternelle au lycée,
le Rectorat doit prendre des initiatives, encourager les projets ces équipes pédagogiques,
les soutenir et les prendre en charge. La démarche artistique et culturelle
comme la démarche sportive ne sont pas des plus, elles ne peuvent se cantonner
à l'après cours et justifier une diminution du temps scolaire et des postes.
Projet
exemplaire, celui de La Maison du Geste et de l'Image avec le Théâtre
Paris-Villette, le Plateau et l'Atelier du Plateau, avec le Laboratoire
d'Aubervilliers, le Ciné 104 et Lilas en scène, d'autres probablement demain.
Ils proposent des lieux à découvrir et des pratiques artistiques à mettre en
œuvre. Des établissements du 2nd degré et des structures
artistiques de part et d'autre du périphérique sont impliquées dans le
projet, d'autre part le travail réalisé est présenté à tous communauté
scolaire et habitants… et des documents DVD, blog internet et papiers
permettre de garder trace du travail réalisé.
Le
19ème, c'est aussi un arrondissement riche de ses grands équipements,
je pense au Parc de la Villette qui est certes une sorte d'enclave nationale
avec ses relations privilégiées avec l'Etat. La
Cité des sciences et de l'Industrie et la Cité de la Musique sont encore bien
éloignées de cette démarche de proximité. C'est dommage. La politique
tarifaire est-elle bien justifiée ? Le Science muséum de Londres est
gratuit… comme bien d'autres. Ne doit-on pas aller dans ce sens, résolument ?
Je suis sûr que pour renforcer cette entrée diversifiée des publics la présence
de Jacques Martial, le président du parc, est significative.
La
proximité, c'est naturellement d'abord, les équipements de la Ville, les
bibliothèques et le Conservatoire. Leur nombre n'est sans doute pas encore
suffisant. La bibliothèque Porte des Lilas et l'agrandissement de la bibliothèque
Flandre vont améliorer la situation mais il faut aller plus loin.
1000
enfants, un taux de pénétration du conservatoire de 3,6 %, qui est le plus
petit de Paris : un second conservatoire pour notre arrondissement ne serait pas
absurde et superflu, loin de là. Avec Hacène Larbi, le nouveau directeur du
conservatoire et Sylviane Forestier, l'adjointe aux affaires scolaires, nous
voulons développer ces initiatives de découvertes musicales, donnant envie d'écouter
et d'avoir des pratiques instrumentales… Découvrir des talents est un des
objectifs mais l'essentiel est celui de former des amateurs… D'être content
de pratiquer et d'entendre la musique... dans la durée de sa vie.
Des
salles pour répéter, pour travailler sont nécessaires. Même
si le 19ème, comme dans d'autres domaines a été bien doté durant
cette mandature, les
ateliers de la Ville sont en nombre trop faibles et ne favorisent pas
l'installation d'artistes en devenir. Les listes d'attentes sont trop longues,
les conditions d'accès à un niveau trop élevées pour les jeunes artistes.
Et
il faut s'intéresser plus aux pratiques amateurs et les aider. Pratiques
chorales, musicales, théâtrales… où répéter, où jouer ? Des avancées
importantes se sont faites durant cette mandature. Il faut les poursuivre de façon
résolue.
Dans
sa lettre à la Ministre de la Culture, Christine Albanel, le Président de la République
insiste sur les financements. Il est révélateur de noter qu'il souligne que
"la culture ne saurait être soumise aux seules lois de l'argent et du
profit…" pour ajouter juste après qu'il faut "encourager le
financement privé de la culture". Son modèle est l'entreprise en tout
domaine. En ce qui concerne la culture, l'éducation, cette conception ne peut
être que catastrophique.
La
progression des crédits est nécessaire pour le budget national mais aussi le
budget parisien.
Des
moyens permettant de développer ce travail de proximité semble nécessaire.
Comment mettre en œuvre ces orientations avec plus de méthode et moins
d'improvisation ? De façon souple, pas trop formalisée, un minimum de moyens
humains, matériels et financiers est nécessaire pour répondre à la diversité
de ce qui peut se faire et devrait se faire dans les arrondissements, qui ne
sont pas des mairies de plein exercice, et donc dans notre 19ème.
Mais
il n'y a évidemment pas que du matériel… il y a aussi la méthode : la
culture a aussi besoin de démocratie, de concertation, de dialogues… Au-delà,
des initiatives "individuelles" que j'ai par exemple pu prendre,
circulation des informations, débat réguliers, des actions sont sans doute à
pérenniser.
Ce
n'est pas un hasard, me semble t-il, que le Maire de Paris choisisse le 19ème
pour parler de Culture, ce sera le 11 décembre prochain. Le thème en sera :
"Populaire, diverse et créatrice de valeurs, la culture à Paris".
Bertrand Delanoë qui élabore actuellement des propositions pour la prochaine
mandature veut mettre un coup d'accélérateur. Sans détailler, il cite la nécessité
d'un plan d'aménagement culturel du quartier Danube Solidarité.
J'ai
naturellement insisté sur des aspects qui marquent l'utilité de la diversité
politique de la majorité municipale et avec chacun d'entre vous probablement,
je souhaite qu'en mars prochain cette diversité soit reconduite et renforcée…
à gauche !
Je
propose maintenant de vous laisser la parole ainsi qu'aux invités.
Rencontre
du lundi 15 octobre 07 sur le thème : Culture de proximité, proximité de la
culture
130
participants
Introduction
par Joel Houzet, adjoint au Maire du 19ème, chargé de la Culture
Elle
se trouve sur le site http://perso.wanadoo.fr/joel.houzet
ainsi que le reportage photos.
Jean-Marie
Touratier, monsieur Culture au Rectorat de Paris
Il
n'est pas facile de gérer la richesse. Il faut amener les élèves à sortir de
la proximité. Un travail peut se faire avec les associations afin d'établir
des systèmes de proximité. Il faut être malin et particulièrement dans ce
cadre scolaire du 16 – 18 h où chaque élève peut pratiquer une activité
artistique ou sportive…
Evelyne
Panato, directrice de la Maison du Geste et de l'Image
On
peut être en même temps proche et éloigné du Territoire culturel. Le groupe
classe est une notion essentielle sinon on s'adresse d'un point de vue
sociologique toujours aux mêmes. La démarche de Territoire en direct vise à
créer des ponts entre établissements scolaires du 2nd degré, établissements
artistiques et culturels de part et d'autre du périphérique. Ces ponts se
forment par des activités artistiques autour de l'image vidéo, graphique et
photographique, par le théâtre et la danse.
Francis
Pilon, directeur de bibliothèques et du multimédia de la Ville de Paris
A
Paris, il y a 55 bibliothèques de proximité avec 11 millions de prêts. Les
demandes se diversifient, il y en a plusieurs, qui finalement nécessitent des
organisations différentes et éventuellement contradictoires.
L'évolution
nous éloigne des lecteurs traditionnels : la bibliothèque devient un lieu de
travail, d'activités multimédia,
d'Internet…
Au
delà d'un maillage plus dense, il y a aussi besoin de plus grandes bibliothèques.
Jean-Marie
Touratier
La
réalité ne fait qu'aggraver la situation. Les publics sont les mêmes depuis
10 ans. Il faut faire des efforts pour élargir l'origine de ces publics.
Frédéric
Fisbach, co-directeur du 104
Le
104 est un lieu d'art contemporain qui ouvrira dans un an. Grâce au politique
qui a su préserver le lieu de la spéculation immobilière, c'est de l'espace
qui se libère et qui va devenir avec sa rue piétonne un nouveau lieu de
passage "agréable". Le 11 bis est aujourd'hui le lieu du 104 avec une
présence visible, l'organisation de visites de chantier et d'autres
initiatives. Répondant à un cahier des charges élaboré par la Ville, la démarche
du 104 vise à montrer l'état du processus de création. Pour cela, l'artiste
est le meilleur médiateur, c'est lui qui parle le mieux de son travail.
Les
activités de l'équipement de proximité seront le résultat d'une consultation
et du travail sur les besoins exprimés par les habitants, parallèlement à la
cohérence d'ensemble du 104 d'un bout à l'autre de la rue piétonne.
L'espace
privé et les financements qui lui sont liés sont importants. On trouvera au
104 un café Presse, en particulier presse internationale lue par les riverains,
un restaurant… des salons… une maison des petits, une librairie multimédia
liée aux activités du 104…
Pascale
Henrot, directrice de Paris Quartiers d'été
Depuis
1990, durant l'été, lorsque les salles sont fermées, Paris Quartiers d'été
a pour mission de développer des propositions artistiques, des spectacles dans
des lieux atypiques. Il s'agit donc d'aller partout où c'est possible en
fonction de la proposition artistique, aller vers le public. 10 villes sont
associées à la démarche. Par contre force est de constater que les allers et
retours sont rares pour les publics les plus en difficulté. C'est un vrai défi
de ne pas démissionner.
Questions
du public
Quelles
aides à la création sont possibles ? Que font dans ce sens le 104, les centres
d'animation ? La gratuité est une démarche trop peu mise en œuvre ? Se préoccupe-t-on
assez des jeunes, particulièrement de ceux qui sont dans la rue ?
Jacques
Martial, président du Parc de la Villette
Le
parc de la Villette est dans une nouvelle dynamique. C'est un lieu culturel à
investir, il a été conçu comme tel. Aujourd'hui, se développent particulièrement
les cultures périphériques. Il faut développer la diversité des possibles.
Concernant
la gratuité, il faut faire un constat. Elle ne modifie pas la qualité des
publics.
Frédéric
Fisbach
La
priorité est de développer l'envie de voir des spectacles. Concernant le cout,
il n'y a pas de règle absolue, une chose est sans doute choquante : pourquoi
payer pour voir le patrimoine ?
Joel
Houzet
On
manque de salles à Paris en particulier pour répéter et pour rencontrer le
public. Comme cela vient d'être le cas pour le projet Soukhmachines place des Fêtes,
les initiatives des jeunes sont souvent retoquées avec les conséquences envers
les jeunes que cela peut entrainer à long terme.